Archives de catégorie : 2.2 Mémoire & souvenir

2.2.3 On Kawara (& Roman Opalka)

Décédé en juin dernier à l’âge de 81 ans, l’artiste On Kawara a passé sa vie à peindre le présent, dans une rigueur toute extime. Cet artiste japonais, qui avait émigré à New York en 1965, était un artiste conceptuel. Son œuvre la plus connue, la série Today, est d’une simplicité enfantine mais nécessitait une concentration presque cruelle : le 4 janvier 1966, il décida de peindre la date du jour sur une toile. L’œuvre devait être terminée dans la journée, sinon elle finissait à la poubelle. Pour cette série, Kawara a réalisé des milliers de tableaux, de formats et de couleurs différents, dont la typographie de la date respectait le pays où la toile était peinte. Puis chaque peinture était conservée dans une boîte en carton contenant une coupure de presse qui informait du lieu et de sa date de réalisation.

C’est une curieuse exposition de soi qui consiste à exposer des dates comme signe extérieur d’une vie dont le sujet s’exclut, à s’absenter en tant qu’auteur. Car, de On Kawara, il n’y a ni discours, ni biographie, seulement une succession de dates et d’itinéraires.[1]

Une journée comme une autre dans la vie d’On Kawara

La performance intitulée One Million Years consiste elle aussi à marquer le passage du temps : commencée en 1969, l’œuvre est double. D’une part, deux livres, One Million Years [Past] (1971) et One Million Years [Future] (1983) où Kawara écrivit à l’aide d’une machine à écrire un million d’années, une à une, partant de 1969 et remontant jusqu’en 998031 avant JC pour le premier ouvrage – dédié à tous « ceux qui ont vécu » durant ce temps -, et partant de 1981 jusqu’en 1001980 pour le deuxième, dédié aux « derniers » des hommes. La performance, quant à elle, implique la lecture à haute voix de cet ouvrage par deux performers, généralement une femme (qui lit les années paires) et un homme (qui lit les années impaires).

Kawara multiplia les œuvres conceptuelles : des cartes postales qu’il envoyait le plus souvent à des amis, pour les séries I went (Je suis allé), I met (J’ai rencontré), I got up at (Je me suis levé à), des télégrammes pour la série I am still alive (Je suis toujours en vie).

Il est intéressant de noter que On Kawara avait un compte Twitter sur lequel on continue à lire, même après la mort de l’artiste, « I am still alive #art ». Il a sur-vécu à son œuvre, par delà la mort.

Il y avait quelque chose d’ironique et mélancolique à la fois chez On Kawara, puisque l’essentiel de sa production était des textes « déictiques », indiquant le moment où ils étaient réalisés, et se rapportant à des actions banales et répétées, […], comme un échec volontaire à cerner ce qui fait le sens des occupations humaines.[2]

Un autre artiste a littéralement passé sa vie à peindre le passage du temps, c’est le Polonais Roman Opalka, né en 1931 et mort en 2011. Comme chez Kawara, « ce qui fait de l’œuvre d’Opalka une véritable omnibiographie, c’est le passage de l’expérience singulière, personnelle, physique, à l’objet comme idée, une idée commune, assurément. Mais dont chacun, et c’est le propre des œuvres d’art, peut faire l’expérience singulière [3]».

Des « détails » de l’œuvre d’Opalka. Le passage du temps fait partie intégrante de son œuvre.
Cette série, débutée en 1965, continua jusqu’à la mort de l’artiste en 2011.
Ce sont donc plus de quarante années qui séparent la première et la dernière photo.

Heureusement pour nous, Opalka était plus loquace que son homologue japonais. Sur le site de l’artiste, on peut toujours lire :

Le 6 août 2011, Roman Opalka a achevé son œuvre : 
« le fini défini par le non fini »

Programme de la démarche: OPALKA 1965/1-∞
Ma proposition fondamentale, programme de toute ma vie, se traduit dans un processus de travail enregistrant une progression qui est à la fois un document sur le temps et sa définition. Une seule date, 1965, celle à laquelle j’ai entrepris mon premier Détail.
Chaque Détail appartient à une totalité désignée par cette date, qui ouvre le signe de l’infini, et par le premier et le dernier nombre portés sur la toile. J’inscris la progression numérique élémentaire de 1 à l’infini sur des toiles de même dimensions, 196 sur 135 centimètres (hormis les « cartes de voyage »), à la main, au pinceau, en blanc, sur un fond recevant depuis 1972 chaque fois environ 1 % de blanc supplémentaire. Arrivera donc le moment où je peindrai en blanc sur blanc.
Depuis 2008, je peins en blanc sur fond blanc, c’est ce que j’appelle le « blanc mérité ».
Après chaque séance de travail dans mon atelier, je prends la photographie de mon visage devant le Détail en cours.
Chaque Détail s’accompagne d’un enregistrement sur bande magnétique de ma voix prononçant les nombres pendant que je les inscris.[4]

À la différence de l’abstraction d’On Kawara, Opalka affiche le passage du temps sur son propre corps. « C’est avec l’incarnation et la dés-incarnation (la peau s’affaisse, la carnation s’en va) que Roman Opalka prend sur lui le poids, la lenteur, la répétition, la litanie du temporel. Ce qu’il appelle « la mise en corps » [5]».

Les tableaux d’Opalka, les Détails, sont autant de pages d’un journal intime : « une sorte de journal sans phantasmes, oui ma trace est faite de mon énergie et je suis en train de créer le savoir de ce que je fais » 23/4 1985[6], « car il y a un aspect journal dans mon histoire » 2/5/1990[7]. « L’ensemble du parcours forme l’image d’une existence qui s’appelle Opalka » 30/04/1990[8].


[1] CAUQUELIN Anne, L’exposition de soi, Du journal intime aux Webcams, Paris, EsHel, 2003, p. 29.

[2] LORET Eric, « On Kawara, le dernier jour » sur Libération [en ligne]. 11 Juillet 2014. Disponible sur <http://next.liberation.fr/arts/2014/07/11/on-kawara-le-dernier-jour_1061937> (consulté le 15 juillet 2014)

[3] HUITOREL Jean-Marc, « L’omniobiographie ou comment, de soi, faire une œuvre d’art », dans WATTEAU Diane (dir.), op. cit., p. 31.

[4] Sur le site officiel de l’artiste <http://www.opalka1965.com/fr/statement.php?lang=fr> (consulté le 17 septembre 2013)

[5] CAUQUELIN Anne, op. cit., p. 31.

[6] ROUBAUD Jacques, NÖEL Bernard, SAVINEL Christine, Roman Opalka, Paris, Éd. Dis-voir, 1996.

[7] Ibid.

[8] Ibid.


2.2.2 Nan Goldin

Nan Goldin admet baser son travail sur le dévoilement de ce qu’on voile normalement, ce que « l’on cache, que l’on nie  » :

[…] J’ai grandi dans une banlieue de Washington où les gens vivaient reclus. Je voulais voir ce qui se passait chez les voisins et que les voisins voient chez moi. C’était évidemment impossible. J’ai alors commencé, à 8 ans, à écrire un journal intime, afin de m’éloigner de la folie. Je me suis mise à prendre des photos à 15 ans, pour enrichir les mots. Mon journal écrit ne parle que de moi, ce qui le rend ennuyeux, alors que les photos parlent de ma relation à l’autre. Elles me permettent aussi de montrer la continuation d’une relation.[1]

L’enfance de Nan Goldin a été marquée par un traumatisme important :

Le 12 avril 1965, Barbara (sa sœur aînée), âgée de dix-huit ans, décida de mettre fin à ses jours de manière violente, et ce fut comme si la vie arriva à sa fin pour toute la famille. Ses parents refusèrent de se laisser aller à la culpabilité et au deuil, et le rejet devint un moyen de survie. La chose la plus importante était que les voisins ne soient au courant de rien. Ils essayèrent aussi de laisser Nancy [Nan] dans l’ignorance, lui racontant que Barbara avait eu un terrible accident, mais aussi sensible et traumatisée qu’elle l’était, elle comprit immédiatement ce qui s’était passé. C’est peut-être l’origine de son appétit vorace pour la vérité, coûte que coûte, et de son mépris du fait que la vérité peut aussi être inconfortable, fatigante, compromettante. Elle était engagée dans un combat contre tout et tous, mais surtout contre le mensonge et le matérialisme de cette époque, qu’elle percevait comme les ténèbres de l’âme de l’Amérique, le cauchemar qui se cachait derrière le “rêve”.[2] 

« Nan après avoir été battue », 1984. Plutôt que dans l’intimité de ses amis,
c’est dans celle de Nan Goldin que cette photo nous place.

« Je me disais jadis que je ne perdrais jamais quelqu’un, si je photographiais assez », déclare Nan Goldin dans son documentaire autobiographique I’ll be your mirror :

Mes photos me montrent combien de gens et de choses j’ai perdus. Ma survie dépendait de mon travail. J’avais besoin de donner un sens au chaos dans lequel je vivais. […] Je crois en l’intimité, en la privauté – mais je pense que les gens protègent à tort certaines choses – comme la sexualité et la honte qui s’y trouve attachée. […]J’estime qu’on peut […] permettre aux gens d’accéder à leur âme – en leur permettant de se voir tels qu’ils sont. Prendre une photo de quelqu’un, c’est comme le caresser. C’est de l’ordre de la séduction. […] Des gens proches de moi disent que je leur laisse assez d’espace pour qu’ils s’autorisent plus encore à être eux-mêmes qu’ils ne croyaient pouvoir le faire.[3]

L’extimité de Nan Goldin passe par l’exposition des moments les plus intimes de ses amis.
Ici, le dernier baiser de Gotscho à Gilles à en train de mourir du SIDA en 1993.

Le traumatisme de la perte de sa sœur l’a amenée à nouer une relation très forte, à la limite du fusionnelle, avec ces personnes. Et même lorsqu’elle évoque la violence, sous toutes ses formes (elle n’hésite pas à photographier un de ses amis en train de se droguer, un couple d’amis en train de faire l’amour, de même qu’elle n’hésite pas à prendre un portrait d’elle-même, le visage tuméfié par les coups donnés par son amant de l’époque), ce n’est pas non plus gratuit, « elle se voit immédiatement prise en charge
[…] par la complicité de la photographe, par sa propre implication subjective [4]».

L’extimité de Nan Goldin est une ode à sa « famille » d’amis qu’elle « peut […] suivre de la boîte de nuit à leurs chambres d’hôtel, d’hôpital ou mortuaires [5]». Elle les fige dans le temps, elle veut nous faire partager ses moments d’intimité, pour ne jamais les oublier, même si certains sont parfois douloureux. « Mon journal est ma façon de garder le contrôle de ma vie. Cela me permet d’enregistrer de façon obsessionnelle tous les détails. Cela me donne le pouvoir de me souvenir [6]» résume-t-elle. 

À l’instar de Mekas, l’extimité de l’artiste est ici une extimité partagée,

à force de les [les amis photographiés] retrouver, ils nous deviennent même familiers. Le désir, la compassion, la tristesse, les sentiments qui les traversent, les événements qu’ils vivent se reflètent dans notre propre vie. Leur intimité croise et interroge la nôtre par rejet, curiosité, identification, glissement ou plus simplement en éveillant des souvenirs.[7]

À l’heure actuelle, Nan Goldin continue de nous livrer son journal intime photographié et on la retrouve toujours dans des rétrospectives, des livres ou des nouvelles expositions de ses photos, « projetées en diaporamas et accompagnées de chansons [qui] racontent des tranches de vies [8]». Et même si elle n’a ni site, ni page Facebook, et « n’existe » pour ainsi dire pas sur Internet, le versant autobiographique de son œuvre a pourtant pris, au fil des années, un nouveau tournant : c’est la rencontre avec Scott Campbell, grand tatoueur américain, qui lui a donné l’envie « d’écrire [son] autobiographie sur [son] corps  ». La peau comme ultime surface du récit de sa vie.

Photographie du tatouage de Nan Goldin réalisé par Scott Campbell.
« I’m sorry » parce que c’est quelque chose qu’elle avait tout le temps l’habitude de dire.

[1] « L’album de famille cru et intime de Nan Goldin », Le Monde, 13 Décembre 2003. Propos recueillis par Michel Guerrin.

[2] COSTA Guido, Nan Goldin, Londres, Phaidon, 2001, p. 5.

[3]  A.M. Homes, « The intimate Eye », in La Sphère de l’intime, Saint Herblain, Coéditions Le Printemps de Cahors, 1998, p. 47.

[4]  BAQUÉ Dominique, Mauvais genre(s) : érotisme, pornographie, art contemporain, Paris, Éd. du Regard, 2002, p. 29 et ss.

[5] TATOT Claude-Hubert, op. cit., p. 76.

[6] DE MAISON ROUGE Isabelle, op. cit., p. 34.

[7] TATOT Claude-Hubert, ibid.

[8] Ibid.


2.2.1 Jonas Mekas, le vi(e)déaste

Jonas Mekas’s films celebrate life. They rise up against the world’s overwhelming commercialism, attempting instead to revive the pleasures of friendship, a first snowfall or the return of Spring. Mekas’s genius stems from his generously including the viewer in his vision of the world, allowing us to (re)discover, in a simple image, the incredible force and necessity of poetry.[1]

Parler de journal extime en ce qui concerne Jonas Mekas est évident tant ce terme semble écrit pour lui. Membre de Fluxus, Mekas est reconnu pour avoir développé, durant toute sa vie, les formes diaristiques du cinéma, autrement dit les différentes formes du journal intime filmé.

Cet enfant de Lituanie a connu l’occupation soviétique, puis nazie, puis les camps de travaux forcés et les camps de concentration, dont il garde comme seul souvenir l’image de son père face à un peloton d’exécution (dont il réchappa). Malgré cela, il qualifie son enfance de « paradisiaque ». Sa toute première photo, raconte-il dans une interview avec Laure Adler, est celle de l’arrivée de l’armée soviétique dans son village lituanien, photo aussitôt détruite par un soldat russe qui s’est emparé de l’appareil et l’a jeté à terre.

C’est en posant le pied à New York en 1949 qu’il acheta ce qui allait définir sa vie et sa pratique artistique : une caméra Bolex. Et depuis ce jour, inlassablement mais toujours avec le même entrain, Mekas filme sa vie, dans les moindres détails.

J’avais ce besoin pressant, cette obsession, je devais enregistrer ce qu’il y avait sous mes yeux. Parfois je m’expliquais les choses en disant « Ah ma patrie est si loin derrière moi, j’ai perdu tous mes écrits, mes journaux intimes, que j’ai enterrés quand je suis parti et puis ceux-là sont pourris, mangés par les vers ». Aujourd’hui, il faut que j’enregistre les choses. Et puis ma mémoire est assez défaillante. […] il faut que j’arrive à l’essence des situations, des moments que je vis et c’est la caméra, l’objectif qui saisit tout cela. C’est une obsession.[2]

Quelques images tirées de Walden, le « journal filmé » de Jonas Mekas entre 1964 et 1968.

Sa production vidéo inclut quelques documentaires (The Brig, 1963) mais comprend surtout son journal intime filmé, décliné sur une multitude de bobines : Walden (1969), Reminiscences of a Journey to Lithuania (1972), Lost Lost Lost (1975), Scenes from the Life of Andy Warhol (1990), Scenes from the Life of George Maciunas (1992), As I was Moving Ahead I saw Brief Glimpses of Beauty (2000), Letter from Greenpoint (2005) et Sleepless Nights Stories (2011). S’intéressant très tôt au cinéma expérimental, et fondateur de la Film-Makers’ Cooperative (Coopérative des Cinéastes, toujours active depuis sa création en 1962), il n’est pas anodin de voir apparaître, dans sa production, certains de ses amis artistes : Warhol, Maciunas, John Lennon, Yoko Ono, Dali…

Continuant sa démarche, il a réalisé, en 2007, une vidéo par jour, soit 365 films qu’il a publiés sur son site. Et depuis, il continue à y partager ses travaux. Son extimité a pris une forme nouvelle avec l’évolution des nouvelles technologies : sa pratique filmique continue toujours mais, de plus, il entretient assez régulièrement son journal extime, via son blog et/ou sa page Facebook.

Je me suis donc contenté de filmer la vie autour de moi, sans penser que ça fournirait un jour la matière d’un journal. Mais c’est une forme naturelle pour moi : j’en tenais un depuis l’enfance. Avant même de savoir écrire, je le faisais avec des dessins. Quand j’ai commencé à maîtriser ma caméra et à me sentir plus sûr de moi, j’ai commencé à pénétrer le cœur de la vie, celle de ma famille, celle de mes amis. Cette approche de l’intimité est devenue monnaie courante avec les petites caméras numériques, mais filmer la vie à l’époque n’était pas dans l’air du temps.
Je n’ai pas de discipline particulière. Un jour, il y a quelque chose, un jour il n’y a rien. Et la seule matière provient de ce que j’ai filmé sur le vif. C’est plus sincère, plus direct, que les journaux intimes d’écrivains ou l’on revient le soir sur les événements de la journée, avec le travail d’interprétation de la mémoire. Moi, je me décris d’ailleurs comme “filmeur” plutôt que cinéaste, parce que je ne décide de rien. Je me promène avec ma caméra dans ma poche et je la sors quand je sens que c’est le moment. Je n’ai aucun plan, aucune note, aucun script, aucune idée ce que je vais filmer et de la manière dont j’utiliserai les images. Les images de Warhol dont j’ai fait des films, par exemple, je les avais tournées sans la moindre intention et c’est le Centre Beaubourg qui m’a incité à les rassembler pour une exposition. Je me contente de filmer la vie devant moi. Et je réfléchis le moins possible. Le montage, je le fais pendant que je tourne, je trouve la structure en filmant, dans l’instant. Comme un musicien de jazz.[3]

L’ouvrage dont Mekas parle, c’est Fluxfriends, sorti en 2002, qui permet d’entrer dans l’intimité de trois membres éminents de Fluxus :

Cher lecteur,
Vous allez trouver dans ce livre des fragments de trois êtres humains dont les vies ont été inextricablement entremêlées par le destin.
Georges Maciunas – esprit et corps de Fluxus, véritable cirque Barnum du mouvement ; humoriste zen, génie de l’insignifiant et du subtil ; créateur de Soho et du mouvement du logement coopératif ; John John – le plus célèbre membre des Beatles, groupe dont l’influence a sans doute été la plus grande de notre temps, dont les activités après 1966 pourraient aisément relever à la fois du Zen et du Fluxus, et Yoko Ono, qui amena John à Fluxus et qui est inextricablement liée à la formation de Fluxus, à la fois par son art et par son amitié avec George – ces amis, dont les existences, l’art et les rêves de changer le monde avec leur art sont entremêlés. Il faudra bien des ouvrages pour véritablement mettre en perspective leurs personnalités et leurs œuvres complexes. Tous les trois, ils ont contribué de manière fondamentale au développement artistique de la seconde moitié du XXe siècle. Leur influence sera encore sensible au siècle suivant.
Ce livre ne contribuera que modestement à la compréhension de leur œuvre. Mais il m’a semblé que les informations qu’il contient permettront de mettre en lumière des périodes et des aspects de leur vie et de leur travail grâce à des renseignements impossibles à obtenir auprès d’autres sources […].[4]

Après avoir survécu à un passé traumatisant, Jonas Mekas, dès son arrivée aux États-Unis, s’est acheté une caméra qu’il a promenée tout au long de son existence sur ce et ceux qui constituaient sa vie, réalisant là l’hypomnèse filmée de sa sur-vie.


[1] Yann Beauvais, sur le site officiel de Jonas Mekas. Disponible sur <http://jonasmekasfilms.com/dvd/?film=walden> [en ligne] (consulté le 16 septembre 2013). Traduction personnelle : « Les films de Jonas Mekas célèbrent la vie. Ils s’élèvent contre le commercialisme écrasant du monde, en essayant plutôt de raviver les plaisirs de l’amitié, de la première chute de neige ou du retour du printemps. Le génie de Mekas provient de son inclusion généreuse du spectateur dans sa vision du monde, nous permettant de (re)découvrir, en une image simple, la force incroyable et la nécessité de la poésie. »

[2] Hors Champ avec Jonas Mekas, France Culture, 6 mars 2013. Par Laure Adler, réalisé par Brigitte Bouvier, Didier Lagarde. Disponible sur le site de France Culture.

[3] Propos recueillis par Laurent Rigoulet pour Télérama [en ligne]. Disponible sur <http://www.telerama.fr/cinema/jonas-mekas-pour-moi-la-camera-est-comme-un-saxophone,90815.php> (consulté le 16 septembre 2013)

[4] MEKAS Jonas, FLUXFRIENDS. Georges Maciunas, Yoko Ono, John Lennon, Paris, Éd. du Centre Pompidou, 2002. Texte de présentation.